♥♥♥♥ Lors d’une longue nuit de réveillon, dans le sous-sol d’un immeuble où logent un intellectuel dissident et un ouvrier de travaux publics. Ces deux compatriotes déracinés, efflanqués du ballot de leur existence, partagent leurs souvenirs de leur pays natal. Tout les oppose : l’un a fui pour ses idées et rêve de devenir un grand penseur, l’autre plus frustre pour vaincre la pauvreté et revenir riche auprès de sa famille. Dans l’excitation et les vapeurs d’alcool, la vérité autour de ce tandem éclate. Elle est drôle, violente et cruelle à la fois.
Ce spectacle nous touche en plein cœur car il nous plonge en plein cœur du quotidien des émigrés : les désarrois du déracinement, les deuils des idéaux, les abnégations, les solitudes… Le texte de Slawomir Mrozek est drôle et grinçant, riche et émouvant. Le décor est d’une beauté très réaliste. La mise en scène de Imer Kutllovci est volontairement épurée pour mieux mettre en lumière la perfection du jeu de Grigori Manoukov et Mirza Halilovic, à la fois subtil, captivant, sincère, en tous points assurément authentique.
Les émigrés, voilà une perle rare, pleine d’humanité. À voir comme une évidence au Théâtre de Déchargeurs. Plus encore : découvrir ce huis-clos est une nécessité pour tous ceux qui aiment le théâtre mais aussi pour tout-un-chacun afin d’approcher au plus près la misère humaine et comprendre les richesses de l’empathie.♦
Le regard d’Isabelle
Théâtre les Déchargeurs, 3 rue des Déchargeurs, 75001 Paris (metro Châtelet)
Du mardi au samedi à 19h00.
Crédit photos : Pascal Gély