Danser à la Lughnasa, le chef-d’œuvre de Brian Friel, nous plonge dans l’Irlande rurale des années 30. Comté de Donegal, dans un grand cottage en dehors de la ville vivent les cinq sœurs Mundy. Aucune n’est mariée. Kate, la plus âgée, est institutrice et la seule à être bien payée. Agnès et Rose tricotent des gants en laine qui sont vendus en ville. Maggie la fantasque et Christina, mère d’un petit Mickael de sept ans, n’ont aucun revenu. Au coeur de ce bel été 1936, dans la grande cuisine, au son du poste TSF, les rires fusent, les chamailleries vont bon train et l’excitation est à son comble car la fin des moissons annonce le bal de la Lughnasa, la promesse de chaudes étreintes et le départ peut-être d’une nouvelle vie… Pour l’heure, les hommes qui les entourent sont inaccessibles : l’oncle Jack, revenu partiellement amnésique d’une mission en Ouganda et le jeune Gerry, l’amant de Christina et le père du jeune Michael, prêt à s’engager dans les brigades internationales dans la guerre civile qui fait rage en Espagne…
Danser à la Lughnasa questionne la condition sociale féminine de l’entre-deux-guerres à travers cette belle histoire de femmes tantôt douce, tantôt amère, teintée de nostalgie. Le texte est ciselé, la psychologie des personnages fine, le casting solide, animé par une « brochette » de comédiennes talentueuses, quoiqu’inégalement expérimentées. Mes deux coups de cœur personnels iront à Lou de Laâge qui campe une très convaincante Christina écorchée vive en proie au dépit amoureux et Florence Thomassin (trop rare sur scène) qui apporte un joli grain de folie à la fantasque Maggie. Seul regret général, la pièce est longue et la mise en scène manque parfois de fougue. Il m’a manqué ce petit supplément d’âme pour plonger complètement dans cette Irlande rurale et me laisser emporter dans la danse. ..
Carole, pour sa part, a passé un moment de théâtre formidable et serait bien restée une heure de plus à écouter les conversations des sœurs Mundy dans la cuisine familiale, tant cette histoire de femmes l’a emballé et la mise en scène séduite… Débat passionné à la sortie de l’Atelier!
Une dernière ligne dédiée à Brian Friel, l’auteur de la pièce, décédé le 2 octobre dernier. Il avait adressé un petit mot à toute la troupe la veille de la première. Hommage.
Le point de vue d’Elisabeth
Théâtre de l’Atelier, 1 place Charles Dullin, 75018 Paris
Crédit photos : Christophe Vootz