♥♥♥♥ Avec cet Œdipe roi, déjà montré au Printemps des comédiens, à Montpellier, en 2022, Éric Lacascade nous livre une adaptation limpide et puissante de la plus célèbre des tragédies grecques, écrite par Sophocle au Ve siècle av. J.-C. Dans un espace dépouillé qui ressemble à une agora, le chœur antique (Jade Crespy et Alexandre Alberts) se fait le porte-parole du public, de l’assemblée à qui Œdipe s’adresse dès le début de la pièce. Ce parti pris du metteur en scène n’est pas sans évoquer le principe même de la démocratie dans laquelle les dirigeants doivent rendre des comptes à ceux qu’ils gouvernent, donnant d’emblée une résonance contemporaine au sujet.
Par le biais de la scénographie fluide et très maîtrisée d’Emmanuel Clolus, on se laisse emporter par la beauté des dialogues et leur incroyable modernité, dépouillée de tout artifice, jusqu’à la chute finale. Malgré toutes ses tentatives – bien humaines – pour sauver son pouvoir, son amour et sa famille, Œdipe ne pourra échapper à sa fatale destinée. Bien que connaissant d’avance le dénouement, nous sommes suspendus du début à la fin aux paroles des comédiens grâce une tension et un suspense constants. Le choix de costumes contemporains (des vestes en lin dans un beau camaïeu de bleu et de vert) s’insère parfaitement dans une scénographie qui laisse libre cours aux mouvements des interprètes, comme dans un ballet parfaitement règlé.
Christophe Grégoire joue une partition magistrale dans le rôle-titre, qu’il soit le roi triomphant et admiré de tous – parce qu’il a sauvé Thèbes de la peste –, ou celui qui n’est qu’un jouet entre les mains des dieux et finira anéanti par son propre destin. Il est entouré d’acteurs à la hauteur de son talent : Karelle Prugnaud, tout en grâce sensuelle en Jocaste, Alain d’Haeyer, poignant dans le rôle de celui qui annonce le futur désastre (Tirésias), tout comme Otomo de Manuel (le berger), Jérôme Bideaux (Créon) ou Christelle Legroux (la messagère). La justesse de leur interprétation leur permet même d’adresser quelques clins d’œil malicieux au public, sans que cela entache pour autant la pièce.
Un spectacle prenant de bout en bout, à conseiller à tous.
Le billet de Véronique
ŒDIPE ROI
La Scala Paris
13, boulevard de Strasbourg – Paris, 10e
Jusqu’au 7 mai 2025
Du mardi au samedi à 21 h
Dimanche à 17 h
Durée : 1 h 30
Crédits photo : Frédéric Iovino
COUP DE THÉÂTRE 