♥♥♥♥ Jérusalem, Eté 1960. Adolf Eichmann a été kidnappé quelques semaines plus tôt par des agents du Mossad en Argentine et est maintenant emprisonné dans une cellule sous haute surveillance. Arrive une psychologue, le Dr Miriam Baum rattachée au bureau n°6 de la police d’Etat d’Israël qui vient interroger l’ancien criminel de guerre afin d’instruire le dossier en vue du procès.
Lors de cet interrogatoire incisif et tendu, Baum cherche à comprendre et à arracher à son interlocuteur des éléments manquants tandis que le Nazi tente de savoir qui est vraiment Baum. Un jeu du chat et de la souris se met en place. Chacun use alors de tous les moyens à sa disposition, sincérité, ruse, mensonge, omissions, agressivité… pour prendre le pouvoir sur l’autre et parvenir à ses fins : Baum, faire admettre ses responsabilités morales au SS dans la « solution finale », et Eichmann, faire accepter à Baum qu’il n’avait pas d’autre choix qu’exécuter des ordres.
La pièce de Donald Freed, basée sur les archives du procès, explore avec justesse les mécanismes qui ont abouti à la Shoah, tout en interrogeant notre capacité de résistance à la barbarie. La tension psychologique de ce face à face révèle progressivement les étapes qui ont mené Eichmann à participer activement à cette logique de destruction, comment lui (et tant d’autres) a basculé vers la haine et l’antisémitisme.
Le texte est d’une intense acuité pour mieux nous démontrer comment chacun peut basculer dans l’horreur s’il ne s’interroge pas sur l’importance de ses actes même s’ils répondent à des ordres monstrueux donnés par sa hiérarchie.
La mise en scène de William Mesguich va à l’essentiel, donnant la primeur à l’échange sous tension qui se joue devant nous. Quant aux interprètes, Nadège Perrier et Hervé Van der Meulen, ils sont au summum de leur art, pour mieux exercer notre esprit critique sur notre monde actuel et en devenir. À voir, pour ne pas oublier. Pour ne pas avoir à (re)vivre les dangers de toute discrimination. ♦
Le regard d’Isabelle
20h10
Durée : 1h15