♥♥♥♥ Il est des spectacles où l’on arrête d’être spectatrice pour devenir confidente. Et « Rose Royal » est de ceux-là. La comédienne Anne Charrier y raconte la trajectoire d’une femme sous emprise amoureuse. Et dès les premières secondes, lorsque les lumières s’éteignent, on est saisi par sa voix chaude, son regard direct, sa posture forte. On devine une issue tragique mais on est happé par cette histoire de femme, dès l’entrée dans ce Studio des Champs-Elysées, un peu à l’écart de l’agitation, comme un refuge pour histoires fragiles.
Rose a une cinquantaine d’années, divorcée, mère de deux grands enfants, « de beaux restes« , une vie cabossée — mais pas brisée — et cette façon de raconter son quotidien qui vous donne l’impression de la connaître depuis toujours. Des hommes, elle en a connu, des déceptions aussi beaucoup, des histoires sans issue. Elle est restée une femme forte, combattive qui a surmonté ses désillusions, ses échecs. Mais elle est restée une femme méfiante, elle porte toujours un revolver dans son sac.
Jusqu’au jour où un nouvel homme, Luc, entre dans sa vie. Rencontre improbable dans un bar, avec ce frémissement qu’elle connaît bien : l’espoir. Premiers émois, naissance de l’amour et l’envie d’y croire, de reconstruire quelque chose, malgré très vite les symptômes d’une relation toxique, les coups, la violence, la brutalité. Elle deviendra une femme sous emprise. Et son revolver ne la protègera plus.
Adapté d’une nouvelle de Nicolas Mathieu et mis en scène par Romane Bohringer, « Rose Royal » est en seul en scène bouleversant, magistralement interprété par la comédienne Anne Charrier, qui irradie dans ce rôle de femme blessée, forte mais ô combien vulnérable. A la fois proche et à distance, elle tisse un lien singulier avec le public, qui suspendu à ses lèvres et solidaire de l’histoire qu’elle nous conte, est presque flatté d’être le témoin de ses confidences tardives. Tour à tout enjoleuse, mutine, désespérée, abandonnée, meurtrie, Anne Charrier offre toute la palette des émotions d’une comédienne tout en majesté, solide, définitivement « dans la peau » de son personnage. Du grand art.
Signé Elisabeth
Studio des Champs-Elysées, 15 avenue Montaigne 75008 Paris
Du jeudi au samedi 21h, le dimanche 16h
Durée 1h15
Crédit photos : François Fonty
COUP DE THÉÂTRE 