♥♥♥♥ Les Bijoux de pacotille, un joli titre qui sonne comme la promesse d’un spectacle tendre, mais dont on comprend très vite la portée plus profonde. La comédienne Céline Milliat-Baumgartner a 8 ans lorsque, le 19 juin 1985, elle perd ses deux parents dans un accident de voiture à Saint-Germain-en-Laye. De cette tragédie, elle tisse un récit confession intime qui fait entendre, sans pathos ni larmes, la douleur, le deuil, l’absence puis sa reconstruction. Nous sommes suspendus aux lèvres de cette comédienne dont le monologue ondoyant nous a laissés le cœur serré et le besoin de silence au moment de se quitter.
Céline Milliat-Baumgartner avance sur scène, élégante, presque juvénile, dans sa jolie robe bleue pastel. Sur le plateau, rien ou presque, un petit coffre et un miroir suspendu dont on imagine la vocation de mise en abyme. Son récit, c’est celui d’une enfance brisée par la mort tragique de ses parents alors qu’elle n’avait pas encore 9 ans. Accident de voiture, véhicule carbonisé, corps brûlés, bijoux cramés, ces bijoux de pacotille, uniques reliques du drame, que portait sa mère le soir du drame. Et elle partage un à un ses souvenirs d’enfant, de jeune fille, puis sa reconstruction lente et progressive une fois adulte, sans chagrin, sans tristesse, sans émotion ou presque. Avec une légèreté et une douceur qui donnent à entendre son récit avec une force et une densité étonnantes.
De sa mère, actrice de cinéma, partenaire de Gérard Depardieu, dans La Femme d’à côté de François Truffaut ; de son père, homme d’affaires, dont elle aurait pu tomber amoureuse, elle se rappelle les mots, les gestes, l’amour prodigué et offre un portrait étonnamment vivant de ses parents qu’elle n’a pas vu vieillir. Une déclaration d’amour posthume d’une grande beauté. Pour donner corps à l’histoire, la metteuse en scène Pauline Bureau fait le choix d’une épure et d’une simplicité magnifiques. Un simple coffre laisse échapper les souvenirs, terriblement émouvants, de la période heureuse : des photos, des extraits musicaux, des films d’archives super 8 qui plongent dans l’intimité d’une famille à qui l’avenir souriait. Au-dessus du plateau, un grand miroir incliné devient le réceptacle des souvenirs : des nuages, des vagues, un bord de mer, comme autant de moment suspendus. Tout est grâce, finesse, délicatesse pour offrir une dimension lumineuse à l’indicible. Faire vivre ceux qui ne sont plus. Et délivrer une leçon de vie d’une infinie pudeur et d’un infini courage.
Signé Elisabeth
Le spectacle a été présenté au théâtre de la Bastille, du 28 avril au 17 mai 2025, et poursuivra sa route dans le cadre du festival « Le printemps des comédiens » à Montpellier les 11 et 12 juin 2025.
Crédit photos : Pierre Grosbois
COUP DE THÉÂTRE 